La 0G- en Algerie


Internet reste chez nous ce qu’est la corruption est à la Suède et la démocratie à l’Arabie saoudite.

Par Moncef Wafi
Le Quotidien d'Oran (30.11.2013)

Les ministres passent et la 3G reste ... aux abonnés absents. Comme une malédiction, le lancement de la téléphonie de troisième génération en Algérie est frappé par un mal inconnu qui oblige les ministres successifs au poste de toujours reporter sa date initiale depuis plus d’une décennie.

Devenue, à la longue, un feuilleton, une saga, un véritable soap, la 3G n’en finit plus de faire sourire jaune les internautes algériens. Dernier rebondissement en date, la déclaration de la nouvelle ministre des PTIC d’ajourner son lancement, prévu initialement ce dimanche, indiquant que « la téléphonie mobile 3G+ ne pourra être lancée qu’une fois le décret exécutif d’octroi de la licence signé et notifié aux trois opérateurs» et que sa notification « n’excédera pas la fin de la semaine prochaine ». Donc, en principe, il faut encore compter une semaine de plus et davantage puisque l’Autorité de régulation de la poste et des télécommunications (ARPT) demandera aux trois opérateurs de soumettre, dans les plus brefs délais, les offres qu’ils comptent mettre sur le marché, précisera la ministre. Et dans la bouche d’un organisme officiel algérien, «les plus brefs délais» sont aussi extensibles dans le temps qu’une vie de ministre. Et là, il faudra encore attendre un petit chouïa pour laisser aux trois opérateurs téléphoniques un temps incompressible pour programmer, chacun d’eux, les numéros (3G+) que l’ARPT va leur attribuer. C’est dire que la 3G algérienne ne verra pas le jour de sitôt. Bref, faut-il s’en réjouir, rester placide ou s’étrangler avec le fil de sa souris pour ceux qui ne possèdent pas une souris sans fil ? Dans un pays où un ministre dure dix milliards de fois que la plus endurante des piles Duracell, que ce même ministre n’est remercié que parce qu’il a pris de mauvais choix optionnels (demandez à Tou et aux derniers débarqués du gouvernement) ou qu’il traîne tellement de casseroles qu’il peut alimenter à lui seul une grande surface d’ustensiles de cuisine, le lancement à temps d’une troisième génération de téléphonie mobile devient un détail de l’histoire. Dans un pays où c’est la première génération qui est toujours au pouvoir, il est difficile de passer la main à une autre génération même quand il s’agit de téléphonie et ça risque de donner de mauvaises idées au troupeau qui regarde.

Ce énième report ne va certainement pas arranger le rang de l’Algérie dans le classement des pays en matière de technologie de l’information et de technologie. Déjà classée parmi les derniers en termes de liberté d’expression et des libertés individuelles, mais parmi les premiers dans la corruption, l’Algérie s’est retrouvée dans les profondeurs d’un classement mondial qualifié d’ « injuste ». Mis en cause, la mauvaise connexion, le débit moribond et les coupures fréquentes du réseau. Alors que la Somalie, toujours en butte avec ses Shebab, surfe depuis plus d’une année sur la 3G, des connexions à 512 kbps sont toujours en cours chez nous. Des chaînes humaines se forment tous les jours de réception devant les agences Actel pour réclamation alors qu’il faut trois quarts d’heure de patience pour que la page de garde de Yahoo ne s’affiche sous le ciel clément de la République. Internet reste chez nous ce qu’est la corruption est à la Suède et la démocratie à l’Arabie saoudite.


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